Une introduction accidentelle de la sangsue piscicole Piscicola geometra dans une installation aquaponique peut très vite tourner à la catastrophe. Et l’éradication est difficile.
Les contextes à risque pour une introduction accidentelle de la sangsue piscicole
Les truitelles qui vivent en milieu naturel avec présence confirmée de sangsues piscicoles dans ce milieu, sont susceptibles de porter des sangsues au moment de l’introduction dans un système aquaponique.
A contrario, aucun risque lors de l’incubation d’œufs de truite sur site ; ni lors de l’achat de truitelles de 5 g qui n’ont jamais connu le milieu naturel; ni pour des truites plus âgées élevées en bassins fermés (Aquaponia par exemple, ou Nego Fish Koi) ou bien issues d’une pisciculture directement alimentée en sortie de source ou de résurgence.

Biologie de la sangsue piscicole en bref
La sangsue piscicole (et autres genres apparentés) est une petite sangsue de 4 à 5 cm de long, très fine, avec une ventouse à chaque extrémité. Ce qui lui permet de se déplacer comme une chenille arpenteuse (d’où le nom geometra). Une des deux ventouses lui permet de se fixer sur des éléments de son environnement et d’attendre une proie pour se nourrir. Au passage d’un poisson, la sangsue nage rapidement vers le poisson. Cette sangsue se nourrit sur les poissons d’eau douce, en privilégiant les poissons affaiblis. Elle est hermaphrodite et pond des cocons d’1 mm de long contenant un œuf donnant de minuscules sangsues de 5 mm de long à la naissance. Durée de vie : 1 an . Les points de succion sont des portes d’entrée pour d’autres maladies. Lorsqu’ils sont fortement infestés, les poissons sont affaiblis et finissent par mourir.

Une calamité en système aquaponique
La sangsue piscicole trouve des conditions très favorables à sa multiplication en système aquaponique, du fait de la qualité de l’eau et de la présence de poissons en très grand nombre. En deux années, une ou deux sangsues introduites en janvier 2023, dans un bassin de 1200 litres, sont devenues 10 000 en fin d’année 2024. (multiplication par 100 chaque année). Et environ 1 million d’œufs tapissent les parois du bassin, prêts à éclore en 2025!

Prévention à l’introduction des poissons, en situation à risques
Un examen visuel des poissons est illusoire compte tenu de la taille des jeunes sangsues (cinq millimètres au stade le plus jeune). Seul un bain surveillé de 15 à 30 minutes dans une eau salée à 15 – 20 g/litre peut détacher ces sangsues et diminuer considérablement le risque d’introduction accidentelle. A faire avant introduction des poissons dans le bassin. Ne pas ajouter l’eau de transport dans le bassin qui peut contenir de jeunes sangsues détachées lors du transport et indétectables à l’œil.
Quelques données complémentaires sur la biologie des sangsues
Des sangsues conservées dans une bassine ont pondu des œufs, fin décembre 2024, dans une eau à 5°. La ponte est donc continue toute l’année. Ces œufs ont été incubés dans une eau à 19° et ont éclos au bout de 18 jours d’élevage (340 ° jour).
Eradication des sangsues piscicoles dans un bassin
Le traitement en présence des poissons est possible, mais uniquement pour des poissons non destinés à la consommation. Des recherches à partir d’extraits végétaux ouvrent quelques pistes pour les poissons comestibles, mais difficiles à trouver en France métropolitaine, et sans référence d’innocuité sur les salmonidés.
Le traitement doit donc être réalisé, en l’absence de poisson et avec circulation d’eau à l’arrêt. On trouve dans le bassin, à la fois des sangsues à différents stades (de 5 à 40 mm) et des cocons très nombreux collés sur le fond, sur les tuyaux et sur les côtés du bassin. Le percarbonate de sodium à 1000 g/m3 est efficace sur les sangsues (100% de mortalité au bout de 24 heures). Les produits dédiés comme le Lernex sont également efficaces sous réserve de traiter à des températures supérieures à 10°C. En revanche , il faudra renouveler l’eau du bassin avant introduction de nouveaux poissons. Des tests sont en cours pour vérifier la destruction des cocons collés sur les parois.
Remarque : la littérature cite abondamment les perches comme prédateurs des sangsues piscicoles : à confirmer.
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